Dans des conditions normales de pression et de température, l'eau pure est un isolant presque parfait.On savait qu'elle pouvait se comporter comme un métal conducteur sous une pression extrême telle qu'elle existe par exemple au cœur de Jupiter, mais des physiciens sont arrivés à obtenir le même résultat sur Terre et très simplement, presque dans des conditions ordinaires.
Une équipe internationale de physiciens vient de faire savoir via un article publié dans la célèbre revue Nature, vidéo à l'appui sur YouTube, qu'elle avait réussi à rendre métallique et conductrice de l'eau sans avoir recours à des pressions de l'ordre de celles que l'on trouve à l'intérieur des planètes géantes du Système solaire.
En effet, l'eau liquide ordinaire sur Terre est certes un électrolyte comme disent les chimistes dans leur jargon, c'est-à-dire une substance conductrice, mais c'est parce qu'elle contient des ions mobiles, par exemple en raison de sels dissous (le sel de cuisine donne ainsi des ions positifs Na+ et négatifs Cl- dans l'eau).
L'eau pure distillée reste encore conductrice mais elle l'est moins, au point que l'on peut presque la considérer comme un isolant, ce qu'en pratique il arrive que l'on fasse.
Toutefois, dans les expériences menées avec l'aide du Berliner Elektronenspeicherring-Gesellschaft für Synchrotronstrahlung (soit en anglais : Berlin Electron Storage Ring Society for Synchrotron Radiation), en abrégé Bessy, un établissement de recherche situé à Berlin, l'eau se comporte vraiment comme un conducteur métallique, tel du cuivre ou de l'or.
La théorie quantique, la clé des matériaux conducteurs
Pour le comprendre, tournons-nous un moment vers la mécanique quantique expliquant les propriétés des atomes et des groupements d'atomes, que ce soit dans des molécules ou des solides cristallisés.
Lorsque l'on considère un solide cristallisé, il apparaît également des niveaux d'énergie, comme si on avait un atome géant mais ces niveaux sont si serrés et nombreux qu'ils forment en fait un quasi-continuum que l'on appelle des bandes d'énergie pour les électrons, comme l'explique la vidéo ci-dessous.
Il existe ainsi une bande de conduction, dans laquelle les électrons peuvent circuler librement, et une bande de valence où ils restent liés aux atomes du cristal.
En comprimant suffisamment un échantillon de matière, par exemple de l'hydrogène", on fait se rapprocher ces deux bandes en diminuant l'écart d'énergie que l'on appelle un « gap" » en anglais.
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Les pressions nécessaires théoriquement de prime abord pour avoir de l'eau métallique sont tout aussi considérables que pour avoir de l'hydrogène métallique, supérieures à celles régnant au centre de la Terre (50 Mbar soit environ 50 millions de fois plus qu'à la surface de notre Planète bleue).
La piste de l'ammoniac liquide
Les chercheurs ont utilisé un alliage Na-K qui est liquide à température ambiante et qui permet donc de faire une sorte de goutte-à-goutte.
Ces recherches avaient montré qu'avec des solutions d'ammoniac liquide et de métal alcalin à des concentrations élevées, on obtenait un comportement métallique.
Remarquablement et comme le montrent les images des expériences publiées dans Nature, l'eau se teinte alors pendant quelques secondes de reflets dorés.
Comme l'ont montré des analyses menées avec la spectrométrie par réflexion optique et la spectrométrie photoélectronique à rayons X générés par synchrotron, le film d'eau se comporte bien comme un métal conducteur avec des électrons libres dans une bande de conduction, électrons fournis par les métaux alcalins.