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Sciences

La physique connue est remise en cause par la masse du boson W !

Il y a presque 40 ans, le Cern annonçait la découverte du boson W. Clé de voûte du Modèle standard de la physique des particules, sa masse est donnée par l'existence du boson de Brout-Englert-Higgs. Celle-ci vient d'être évaluée avec une précision record par les membres de la collaboration qui utilisaient le détecteur CDF du défunt collisionneur de protons et d'antiprotons aux États-Unis, le Tevatron. Elle défie la physique connue, ce que pourrait bientôt confirmer le LHC dans un futur proche.
"« A bolt out of the blue », c'est une expression anglo-saxonne que l'on pourrait traduire par « un éclair tombant d'un ciel bleu" » pour décrire l'annonce faite aujourd'hui par les membres de la collaboration CDF du Fermilab via un article dans Science.
Ce collisionneur de protons et d'antiprotons ne pouvait alors plus être en compétition avec le LHC qui permet de faire des collisions à plus de 10 TeV entre des protons, collisions produisant bien d'autres particules par conversion de l'énergie en masse de ces particules.
Le Tevatron était entré en service au début des années 1980 et il avait sans cesse été amélioré, permettant déjà en novembre 1986 de faire des collisions à 1,8 TeV.
Comme les protons sont constitués de quarks et de gluons, tout comme les antiprotons, les collisions individuelles se font en réalité au niveau de ces composants, de sorte qu'une énergie de 1,8 TeV est répartie entre les particules constituantes.
Le Tevatron avait permis la découverte du quark top en 1995 et il était déjà en mesure de partir à la chasse au boson de Brout-Englert-Higgs et aux particules de matière noire, prédites par la supersymétrie par exemple.
Une vue du détecteur CDF, au Fermilab, où avaient lieu les collisions de faisceaux de protons et d'antiprotons. © Fermilab
Une violation spectaculaire de la physique connue
En fait, on peut chasser de la nouvelle physique soit directement, en tentant de créer de nouvelles particules, soit indirectement, en mesurant des anomalies, des écarts entre des prédictions théoriques et des mesures par exemple de masses de particules connues, de leur moment magnétique (on peut citer la question toujours ouverte de celui du muon), de certains taux de réactions produisant des particules là aussi connues.
Et justement, les membres de la collaboration CDF, qui contient des centaines de physiciens de par le monde, ont continué à analyser les données collectées par CDF jusqu'à sa fermeture et qui concernent la masse du boson W.
Futura avait déjà parlé de ce boson dans les précédents articles ci-dessous auxquels nous vous renvoyons.
Le LHC, avec ses détecteurs géants Atlas et CMS, a lui aussi permis de produire des bosons W et de les étudier mais, si à terme il permettra d'aboutir à des conclusions plus précises et plus robustes que dans le cas du Tevatron avec CDF, le volume de données collectées et déjà analysées ne permet pas encore de faire mieux que dans le cas de CDF.
Dans le cadre du Modèle standard de la physique des particules, la masse d'un boson W est un paramètre libre qui doit être fixé par une nouvelle physique.
Il s'est finalement avéré que la masse mesurée aujourd'hui avec une précision de 0,01% , et qui vaut 80,357 ± 6 MeV/c2, est en désaccord avec ces contraintes et ce avec une valeur de 7 sigma, comme disent les physiciens dans leur jargon (des explications sur ces sigma se trouvent dans la vidéo de la physicienne Nathalie Besson, ci-dessous).
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Un tel désaccord est énorme, car il exprime le fait qu'il est extrêmement improbable que le signal enregistré dans le détecteur soit ce qu'on appelle un bruit statistique dû au hasard, tout comme le fait que parfois un nuage semble prendre la forme d'un animal ou d'un objet.
La prudence s'impose, on a bien pensé pendant un moment que l'on avait découvert des neutrinos voyageant plus vite que la lumière.
Le LHC va bientôt redémarrer et il sera encore perfectionné dans les années à venir avec des progrès dans la luminosité des faisceaux.
Les analyses des données qu'il a déjà collectées sont aussi toujours en cours, elle pourrait confirmer les conclusions tirées des données de CDF.